Les Fantômes du Neuvième Monde
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Les Fantômes du Neuvième Monde

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 Le destin de Diane

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MessageSujet: Le destin de Diane   Le destin de Diane Icon_minitimeDim 7 Sep - 14:37

La mémoire de la terre est étrangère à celle des hommes.

On croit tout connaître de l’histoire et du monde, mais il est des âges oubliés où se croisaient encore mille merveilles aujourd’hui disparues.

Seuls les arbres se souviennent, le ciel et le vent.

Et si un soir d’été, l’âme bienveillante, vous vous allongez dans l’herbe et vous les écoutez avec le cœur ouvert, vous les entendrez peut-être vous raconter cette histoire d’un autre temps, au pays de Laytan.

Celle de la louve blanche et de l’enfant qu’on appelait Diane.
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MessageSujet: Re: Le destin de Diane   Le destin de Diane Icon_minitimeDim 7 Sep - 14:41

LA LOUVE ET L’ENFANT



Ce soir là, dans la province de Ballack, une enfant pleurait dans le sable de la lande.

Il n’y avait rien à perte de vue que cette fillette en haillons, recroquevillée sous les derniers rayons du soleil, là où se terminait la trace rectiligne des ses empreintes de pas.
Le vent jouait autour d’elle. Un vent sec et chaud qui soulevait parfois un nuage de sable blanc. Le ciel de fin de journée s’emplissait déjà de couleurs orangées.

Diane était assise au milieu de nulle part, le visage fouetté par quelques mèches brunes de ses cheveux en bataille. Sa silhouette enfantine se dessinait sur l’horizon comme une ombre chinoise dans le soleil couchant.
Les mains plongées dans le sol, elle souleva deux poignées de sable qu’elle laissa lentement glisser entre ses doigts. Les grains filaient les uns derrière les autres, comme pour mesurer le temps.

Ses parents étaient morts depuis bien longtemps. Hébergée à la ferme de Faldor depuis ses cinq ans, Diane y vivait une enfance heureuse auprès de ceux qui l’avaient accueilli comme l’une des leurs et qu’elle considérait comme sa nouvelle famille.

Jusqu’à aujourd’hui.

Ce n’était pas une journée pas les autres, cela elle l’avait bien compris quand des soldats armés étaient arrivés à la ferme pour soit disant se ravitailler. Sachant que ça lui prendrait du temps, tante Miranda avait envoyé Diane chercher du bois sous prétexte qu’il faudrait faire tourner les fourneaux à plein régime pour nourrir autant de soldats.

Quand elle était revenue, la ferme n’était plus que cendres et ruines, l’odeur des cadavres et du sang lui avait écorché les poumons, et se souvenir, bien des heures plus tard, lui tiraillait encore le ventre.

Diane se demanda si les esprits du bien ne l’avaient pas abandonnée, et pour toujours cette fois. Comme elle se sentait seule !

Elle leva le menton pour exposer au vent le visage de ses treize ans. Si fin, si sombre, si dur et tendre à la fois. Des traînées sombres sillonnaient ses joues, mémoire de larmes séchées. Elle était différente, on le lui avait répété mille fois. Elle n’avait pas le physique habituel des habitant de la province de Ballack. Tout en elle la distinguait des autres villageois : son corps mince et élancé, sa peau mate, ses yeux d’un bleu azur et sa chevelure noire sauvage.

Elle laissa retomber ses mains entre ses genoux et se remit à creuser pour oublier sa colère, ses larmes et la douleur qui labourait son ventre. Et comme à chaque fois qu’elle était triste, elle était venue pleurer dans la lande, seule face à la nature qui semblait l’écouter.

Soudain, sa main heurta quelque chose sous le sable.
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MessageSujet: Re: Le destin de Diane   Le destin de Diane Icon_minitimeDim 7 Sep - 14:50

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La légende raconte qu’une louve connut la même solitude. Les conteurs d’antan appelèrent cette louve Imala, ce qui signifie Blanche dans notre langue, et on la nomma ainsi car sa fourrure, contrairement à celle de tous les autres loups, était couleur de neige.
Ce soir là, Imala partit chercher à boire au pied d’une colline avant d’aller se reposer dasn sa tanière où elle pourrait bientôt s’étendre et mettre bas.

Dès qu’ils avaient senti le comportement étrange des femelles qui geignaient et tournaient en rond à la recherche d’un confort particulier, les mâles avaient agrandi la tanière, creusée sous la façade d’un rocher incliné, en haut de la colline. C’était une tanière magnifique, ensoleillée la journée mais à l’abri du vent, à quelques foulées à peine d’un petit étang où nageaient de grands poissons, et suffisamment en hauteur pour prévenir l’invasion d’autres prédateurs.

Cela faisait plusieurs saisons que la meute n’avait pas changé d’endroit. La terre était assez riche pour que les proies ne manquent jamais. Il y avait suffisamment de chevreuils et de cerfs, et les loups n’avaient pas à migrer chaque hiver.

Imala n’eut aucune peine à trouver ce qu’elle cherchait. Elle but longtemps, relevant la gueule par moments pour regarder autour d’elle, la queue et les oreilles dressées, prête à bondir. Le ventre lourd, elle se savait vulnérable, et les autres prédateurs hésitaient rarement devant une femelle pleine.

Quand elle fut désaltérée, elle revint vers son liteau avant le coucher du soleil. Les poils qu’elle perdait sous son ventre depuis quelques jours formaient sur le sol un duvet confortable et elle se laissa tomber sur ce tapis moelleux, les yeux mi-clos. Elle était fatiguée et faisait peine à voir, mais les mâles préféraient s’occuper d’Ahéna, la louve dominante, pleine elle aussi.

Imala n’était pas une louve comme les autres. Jamais une autre femelle n’aurait osé s’accoupler dans une meute déjà dotée d’un couple dominant. C’était contraire à la nature du clan, contraire à la nature même des loups. Les louves se soumettaient naturellement à l’autorité de la dominante et bloquaient d’elles même leurs chaleurs. Mais Imala en avait décidé autrement.

Elle était résolue, insolente, et il ne faisait plus aucun doute qu’elle devrait quitter la meute si elle ne parvenait pas à remplacer la dominante. Imala ne pouvait plus se soumettre. La nature lui réservait autre chose : elle devait mettre bas.

Elle avait toujours eu du mal à se faire accepter par la meute, peut-être à cause de la blancheur de sa fourrure, ou à cause de la fierté qu’elle semblait en tirer. Elle s’était donc résignée à s’occuper elle-même de la naissance de ses louveteaux et espérait seulement que Taïmo, leur père, finirait par venir l’aider à les nourrir.

L’hiver était passé, les loups avaient survécu nombreux, et Imala savait que sa portée serait sans doute de trop pour le clan. Mais elle était fière, et aucun loup n’aurait su l’intimider. Elle était la plus forte des jeunes louves et avait déjà essayer deux hivers de suite, à la saison des amours de détrôner la dominante.

Mais Ahéna était encore la plus forte, et Imala vaincue, s’était accouplé en cachette avec Taïmo, un des jeunes loups. Elle était devenue le jour même la rivale directe d’Ahéna, laquelle ne manquait jamais une occasion de lui rappeler sa suprématie par des grognements ou des gestes violents.

Tout semblait indiquer que l’unité du clan était menacée. La meute allait vers une rupture. C’était la loi de la nature. Se battre ou mourir. Imala comprenait d’instinct que si elle restait trop longtemps, Ahéna finirait par l’attaquer, et sans doute la tuer. Il faudrait donc partir, mais pas tout de suite. Elle allait avant tout montrer qu’elle était louve et qu’elle pouvait mettre bas !

Quand elle se fut installée confortablement sur son nouveau liteau et que le soleil eut complètement disparu derrière le rocher imposant qui surplombait la tanière, Imala fut la première à hurler, et les loups des autres meutes au loin répondirent bien avant les siens.


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MessageSujet: Re: Le destin de Diane   Le destin de Diane Icon_minitimeSam 27 Sep - 15:14

Décontenancée, Diane arrêta soudain de creuser. Que pouvait-il y avoir sous cette couche de sable, au beau milieu de la lande ? Il y avait quelque chose d’anormal dans la matière de l’objet que ses doigts venaient de toucher. Quelque chose qui n’aurait pas dû se trouver là.

La jeune orpheline n’avait pas été gâtée par le destin jusqu’à présent. Elle avait fini par apprendre à ne rien attendre du hasard et à ne faire confiance à la bonté de personne. C’était comme si les esprits avaient décidé de s’acharner sur cette enfant pour mesurer sa force.

Bien sûr les gens de la ferme de Faldor avaient pris soin d’elle, mais plus comme d’une enfant abandonnée, laissée là pour s’en débarrasser que comme l’une des leurs. Une maigre pitance pour un dur labeur, juste de quoi ne dépérir et assurer aux fermiers que la fillette aurait l’énergie nécessaire pour accomplir toutes les tâches rebutantes qu’ils lui confieraient le lendemain.

Et le village voisin n’offrait aucune pitié à ces enfants délaissés. Les marchands et les mères, détournaient le regard quand passait Diane, les mains dans les poches, les cheveux en bataille, et préparant sans doute, selon eux, un mauvais coup …

Diane en arrivait à ne plus envier personne, parce qu’au fond d’elle, elle se sentait unique. Elle ne se sentait heureuse que dans le calme de la nature, les soirs où elle « s’échappait » de la ferme et du village. Elle s’était dit qu’elle était la fille de la terre, et que le vent, le sable, les arbres, le ciel et les animaux étaient ses seuls compagnons. Fille de la terre, elle en avait fait son surnom et se faisait appeler ainsi par les autres enfants.

Quand elle s’aventurait ainsi hors du village, elle ramassait tout ce qu’elle pourrait y vendre. Des baies, des champignons, et même des fleurs des plaines qu’elle savait si bien présenter, fraîches ou séchées.

Certains villageois lui achetaient parfois sa marchandise, comme l’aubergiste bedonnant de « L’oie grillée », qui donnait même à Diane toujours un peu plus qu’elle ne le demandait. Maigre consolation pour une fillette affamée, mais elle s’en contentait. Elle faisait alors la fière et allait s’acheter de quoi manger.

Personne ne connaissait le village aussi bien qu’elle, les petites allées, les bosquets, les granges, le labyrinthe de petites venelles, les coins sombres où se cacher. Pas même les garçons de la rue à qui elle tenait tête. Elle savait se battre et était souvent obligée de le faire, seule face à ces garçons arrogants et trop sûrs d’eux.

Diane devait se débrouiller seule. Elle avait toujours été seule. Elle ne connaissait que la solitude. Ou du moins n’avait-elle aucun autre souvenir. Comment était-elle arrivée là ? Avait-elle jamais eu des parents ? Au plus loin qu’elle pouvait remonter dans sa mémoire, elle ne s’en souvenait pas. Et sinon, qui l’avait laissée là ? À quel âge ? Et pourquoi ?

Mais aujourd’hui, au beau milieu de la lande, alors que ces questions revenaient en cascade comme pour attiser sa douleur et qu’une petite voix dans sa tête lui criait de partir, une question prenait le dessus sur toutes les autres : Qu’y avait-il enfoui dans le sable de la lande ?

Alors, si c’était un trésor qui se cachait là, sous le sable, et qu’enfin elle devenait riche ?

Diane soupira et entreprit enfin de découvrir ce qui était enterré là, juste devant elle…
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MessageSujet: Re: Le destin de Diane   Le destin de Diane Icon_minitimeLun 29 Sep - 0:28

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Couchée en rond dans son liteau, Imala fut souvent réveillée par les louveteaux qui déjà, bougeaient dans son ventre comme s’ils voulaient sortir.

Avant de partir à la chasse, Taïmo s’était lentement approché d’elle et l’avait frottée de l’épaule dans un geste amical. Il lui signifiait simplement qu’il sentait sa peur et sa fatigue, et qu’il lui ramènerait de quoi se nourrir.

Elle n’avait jamais mis bas, mais grâce à son instinct maternel, elle savait que ça la ferait souffrir et qu’il faudrait beaucoup de patience et de force pour que ses petits survivent. Bien qu’elle ne se souvienne pas de sa propre mère, elle savait comment faire.

Cette nuit là, au cœur de la forêt, Taïmo et les autres mâles s’approchaient lentement d’un cerf égaré. En tête de file, Taïmo se mit à ramper sur le ventre et avança prudemment, marquant une pause à chaque pas et adaptant son rythme aux bruits naturels de la forêt.

De la bave coulait déjà le long de sa gueule. La faim et l’excitation le saisissaient au ventre. Les autres loups se déployèrent en silence à droite et à gauche pour encercler leur proie.

Mais avant qu’ils n’aient eu le temps de former un cercle, le cerf s’immobilisa en dressant la tête. Il se mit à humer l’atmosphère par à-coups, et avant que les loups ne puissent réagir, il sentit qu’il était en danger et sauta brusquement pour s’enfuir dans l’obscurité. La chasse commençait.

Les loups se mirent à courir à la poursuite de leur proie, moins habiles et peut-être moins rapides, mais plus nombreux et animés par la faim. La force de la meute résidait dans son entêtement et sa patience, un véritable harcèlement.

La poursuite s’accéléra, mais la forêt opposait de nombreux obstacles aux chasseurs comme à la proie, des branches basses, des rochers, des talus et des fossés, et très vite la fatigue se fit sentir. Bientôt le cerf entendit le souffle des ses poursuivants qui se rapprochaient et finit par faire volte-face au pied d’un haut rocher pour affronter le danger en s’embûchant.

Les loups arrêtèrent aussitôt leur course et se mirent en demi-cercle pour acculer le cerf au rocher. Au lieu de sauter directement sur leur proie, ils attendirent sans bouger et certains se couchèrent même sur le sol sans perdre le cerf de vue.

Celui-ci fraya des bois contre la terre et poussa un bramement sourd pour impressionner ses attaquants. Mais les loups ne bougeaient pas. Ils regardaient patiemment le cerf trépigner et attendaient que son attention se relâche pour lui sauter enfin dessus.

Le cervidé était penché en avant, les deux pattes arrières tendues, et il gardait ses cors à hauteur des loups, prêt à se défendre. Mais comme les prédateurs restaient immobiles, il releva la tête et se mit à avancer en crabe, cherchant une brèche dans leur étau. Taïmo en profita.

Il bondit vers le cerf la gueule grande ouverte, les babines retroussées et la crinière hérissée. Le cervidé réagit aussitôt et envoya un coup de cors vers son assaillant. La gueule de Taïmo s’empala en plein vol dans l’une des ramifications des bois du cerf, et le loup fut projeté au sol d’un coup de tête, accompagné par une giclée de sang épais. Alors que les autres loups s’élançaient, le cerf se tourna en se cabrant et donna un violent coup de pattes à Taïmo qui tentait de se relever avec peine. Le loup reçut les sabots en pleine tête et mourut aussitôt.

Mais le cerf ne put faire front aux multiples prédateurs qui l’attaquaient de toutes parts. Il donna des cors et des pattes dans un ultime effort pour survivre, mais un jeune loup lui sauta à la gorge et ne lâcha pas prise. À mesure qu’il perdait son sang, le cerf perdait sa force et ne fut bientôt plus secoué que par des sursauts de vie sans espoir.

Les loups traînèrent le cerf mourrant derrière eux, abandonnant le cadavre de Taïmo dans une marre de sang au cœur de la forêt.

Le lendemain matin, Imala fut réveillée par les bruits de la meute et l’odeur forte de la viande fraîche. Les mâles avaient ramené le cerf à la tanière et déjà tout le clan se partageait la proie avec un appétit vorace.

Imala s’étira de tout son long, se dressa sur ses pattes et regarda autour de la tanière. Elle remarqua très vite que Taïmo n’était pas là. Elle s’approcha des loups qui dévoraient le cerf et comprit, en voyant le sang rouge sur leurs poils et sur les cors de la proie, que la chasse avait été brutale et que sans doute Taïmo n’avait pas survécu.

Elle émit un gémissement d’inquiétude et le regard d’Ehano, le loup dominant, qui arrêta un instant son repas, confirma ses inquiétudes.

Taïmo n’était plus, le cerf l’avait tué.


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MessageSujet: Re: Le destin de Diane   Le destin de Diane Icon_minitimeVen 3 Oct - 0:08

Diane poussa un cri d’horreur.
Une main était apparue sous le sable.

La fillette fit un bond en arrière et se traîna à reculons sur quelques mètres sans cesser de hurler. Quand enfin elle s’immobilisa, estimant qu’elle était assez loin pour être hors de danger, elle prit réellement conscience de ce qu’elle venait de découvrir.

Elle qui espérait trouver un trésor !

Ce n’était finalement rien d’autre qu’un cadavre, sans doute recouvert par une tempête de sable.

Diane se demanda ce qu’elle allait pouvoir faire.
Courir au village et prévenir les habitants ?
Jeter un peu de sable par-dessus et l’oublier ?

Le soleil avait presque entièrement disparu derrière l’horizon. Loin au sud, on distinguait à peine les lumières rougeâtres et la fumée du village. Il allait bientôt faire nuit.

Une idée la saisit soudain. Et s’il était riche ? Si le cadavre portait sur lui des bijoux, ou même une bourse bien remplie ? Elle se dit d’abord qu’elle n’aurait jamais le courage de le déterrer complètement, et encore moins celui de le dépouiller ensuite.

Ce n’était certes pas la première fois qu’elle voyait un cadavre, mais celui-là, enfoui sous le sable, avait quelque chose d’étrange qui la terrorisait. La position de cette main qui sortait du sable, était comme un avertissement, c’était la main d’un vieil homme, mais elle était dure et droite, et suppliante à la fois. Elle semblait se tendre comme une menace vers Diane.

Après tout, maintenant qu’il était mort, l’homme n’aurait sûrement plus grand-chose à faire de ses richesses … Mais n’était-ce pas faire un affront aux esprits ? Risquer de changer le cours des choses en volant le sort d’un autre ?

À moins que les esprits n’aient délibérément placé ce cadavre sur son chemin ?

Après tout, combien y avait-il de chances pour que Diane se mette à creuser dans la lande juste au bon endroit, et au bon moment ?

La fillette s’essuya la bouche sur le revers de sa manche comme pour se donner du courage et avança lentement, à quatre pattes, vers la main qui dépassait du sable, juste devant elle. Elle remarqua alors sur l’un des doigts un magnifique anneau serti d’une pierre précieuse d’un rouge étincelant. Elle était bien incapable d’en donner le nom, mais elle avait sûrement une valeur inestimable.

Le bijou semblait être là pour confirmer ses doutes et l’encourager à déterrer le corps. Elle se dit que si elle arrivait à prendre celui-là, ça lui donnerait le sans doute le courage de continuer. Mais l’idée de toucher un cadavre qui était peut-être là depuis plusieurs jours la dégoûtait franchement. Elle lança un regard circulaire pour s’assurer que personne ne la verrait. La plaine était vide.

Diane tendit la main vers le bijou, ouvrant et refermant son poing au rythme de ses hésitations, et se décida finalement en se mordant les lèvres.

Elle fut d’abord surprise de constater que la main qui dépassait du sable n’était pas aussi froide qu’elle s’y attendait, on disait toujours que les morts étaient glacés, celui-là avait dû être réchauffé par le soleil et le sable.

Elle prit sa respiration et commença à tirer sur la bague. L’anneau avait du mal à glisser sur le doigt sec de son propriétaire. La peau se plissait et retenait la bague. Diane tira plus fort. Elle tremblait.

L’anneau céda enfin. Au même instant, le poing se referma sur la main de Diane.

La petite hurla. Le poing ne lâchait pas. Il était ferme, crispé, et cela lui faisait mal. La main semblait vouloir tire Diane vers le sable. L’entraîner dans le cœur du désert, pour la punir. Soudain, elle sentit le long de son bras un choc étrange, transmis par la main du corps ensablé, ou peut-être tout simplement par la peur. La terreur pure.

Elle sauta le plus loin possible en arrière, se releva et courut sans réfléchir vers le village, les yeux écarquillés, la gorge brûlée par son hurlement continu, laissant derrière elle un poing fermé sur l’horizon de la lande.
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MessageSujet: Re: Le destin de Diane   Le destin de Diane Icon_minitimeLun 13 Oct - 2:34

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Les louveteaux naquirent au milieu de l’après-midi. Imala mit bas cinq petits qui crièrent pendant de longues minutes avant que les coups de langue de leur mère ne les calment enfin.

C’étaient cinq petites boules de poil gris foncé aux reflets roussâtres, les yeux complètement fermés et le museau presque plat. Deux petits triangles discrets coiffaient leur crâne en guise d’oreilles. Leurs pattes griffues tremblaient doucement, malhabiles, elles s’enfonçaient dans le sol du liteau, à la recherche d’un équilibre qu’elles ne trouvaient guère.

Imala était épuisée et confuse. Elle tentait de se fier à son instinct, mais les cinq louveteaux la terrifiaient tout autant qu’ils l’attendrissaient. Par-dessus tout, elle se sentait seule. La mort de Taïmo signifiait qu’elle allait devoir s’occuper seule de la portée.

Elle regarda ses cinq petits comme pour mieux les connaître. Ils avaient chacun une différence subtile, dans leur odeur, dans la couleur de leur fourrure, dans la forme de leurs oreilles, ou dans leur taille tout simplement, et Imala réussit très vite à les identifier.

L’un des cinq était nettement plus gros que les autres. Il semblait aussi plus dégourdi. Un autre, le plus maigre, semblait fragile et respirait à peine. Ils étaient déjà tous pour elle, des petits loups pleins de promesses.

À quelques pas de là, Ahéna avait mis bas elle aussi, mais Imala ne pouvait distinguer grand-chose derrière la meute assemblée en rond. Elle enviait la louve dominante, mais revint à ses petits, blottis contre son ventre.

Affamée, elle commença par se repaître de son propre placenta, ne s’arrêtant par moments que pour donner un coup de langue réconfortant aux cinq nouveaux-nés qui allaient bientôt trouver le chemin des mamelles nourricières.

Elle se demanda quel mâle allait finalement quitter Ahéna pour lui apporter un peu de viande fraîche et lança un grognement vers le clan. Quelques loups tournèrent la tête, la regardèrent un instant, mais aucun ne vint jusqu’à elle.

Aucun n’aurait osé contrarier Ahéna en montrant trop d’affection à sa rivale, qui en plus, avait l’orgueil de mettre bas à un moment où le clan n’avait pas besoin de nouveaux membres.

Imala chercha une position confortable. Du bout du museau, elle ramena ses petits contre son ventre, puis elle laissa tomber sa tête sur sa couche, cherchant un repos mérité.

Elle fut réveillée par les premières succions de ses petits. Trois d’entre eux avaient déjà trouvé le chemin et l’utilité de ses mamelles, et tiraient dessus sans vergogne. Elle lâcha un long soupir où se devinait à la fois fatigue et soulagement.

Quand ses yeux s’habituèrent doucement à la lumière, elle découvrit que l’essentiel de la meute était parti à la chasse, qu’il ne restait qu’Ahéna et ses petits, juste sous l’ombre du rocher. Elle put enfin découvrir la portée de la louve dominante. Ils étaient plus nombreux que les siens, et peut-être même déjà plus gros. Ahéna leva les yeux vers elle et fit un signe en remuant la tête et en couchant ses oreilles vers l’avant.

Imala ne répondit pas. Elle était trop fatiguée et s’était déjà soumise mille fois. Elle ne comprenait pas l’acharnement d’Ahéna à vouloir faire ainsi la démonstration de sa suprématie. Peut-être la dominante était-elle jalouse de la couleur unique de la fourrure d’Imala. Ou bien était-ce toujours ainsi ? On n’échappait pas à la loi de la nature ni à l’ordre établi par la meute.

Les rayons du soleil disparaissaient derrière les branchages entrecroisés des chênes qui surplombaient la colline. Imala était sur le point de s’endormir à nouveau quand un grand loup arriva seul à la tanière. Sans doute était-il parti chasser en solitaire, car il revenait avec un lièvre entre les crocs.

C’était Lhor, un loup majestueux et qui semblait aussi fort qu’Ehano. Il s’arrêta un moment, déposant le lièvre devant lui avant de se frotter dessus pour y imprégner son odeur. Il voulait clairement montrer que cette proie était la sienne. Ahéna lui jeta un regard méprisant et reposa sa tête sur ses petits.

Le loup se mit à nouveau sur ses pattes et commença à déchirer la peau du lièvre avec ses incisives, le maintenant au sol avec ses griffes. Les babines retroussées, il poussa quelques grognements jusqu’à ce que la chair cède et que le lièvre soit complètement ouvert.

Il mangea un moment en jetant régulièrement des regards aux deux louves qui gardaient chacune leurs petits, puis, soudain, contre toute attente, apporta les restes de son lièvre à Imala et s’assit à côté d’elle, comme pour la forcer à manger.

La louve hésita. Plus loin, Ahéna commençait à grogner, mais elle n’était pas en position de se battre et Ehano n’était pas là pour faire régner l’ordre à sa place. Lhor s’approcha d’avantage et poussa encore le lièvre déchiqueté vers Imala jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus refuser. Elle saisit la proie tout d’un coup et mangea sans s’arrêter.

Aussitôt, Lhor fit demi-tour et disparut dans la forêt.


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MessageSujet: Re: Le destin de Diane   Le destin de Diane Icon_minitimeMar 21 Oct - 15:47

Le village était presque complètement éteint quand Diane s’écroula au pied de sa grande porte d’enceinte.
À bout de souffle, elle posa une main sur le sol et l’autre sur son ventre, comme pour calmer la douleur qui à présent se transformait en nausée.


Que lui arrivait-il ? Pourquoi son ventre semblait-il se contracter ainsi ? La panique la gagna entièrement jusqu’à ce qu’enfin elle ne puisse plus retenir la nausée qui lui retournait le cœur.
Les yeux emplis de larmes, elle se mit à vomir sur le sol, manquant de perdre l’équilibre.


Elle cracha plusieurs fois avant de relever la tête pour chercher un peu d’air frais.

On entendait au loin les rires de fêtards à l’entrée des auberges et le grincement des volets qui se fermaient. Le village entrait paisiblement dans la nuit comme tous les autres villages de la province de Ballack.

Diane resta immobile un long moment, cherchant à reprendre son souffle et à retrouver ses esprits. Elle se releva enfin et s’éloigna en soupirant de l’endroit où la nausée l’avait prise.
Elle se demanda si elle pourrait encore parler, tant sa gorge la brûlait.
Elle enfouit sa main dans sa poche pour s’assurer de nouveau que la bague était toujours là. Elle avait vérifié au moins dix fois déjà. Elle ne devait pas la perdre, cela pourrait lui servir de preuve.


Quand elle sentit le froid du vent sur sa nuque, elle se décida enfin à entrer dans le village et se résolut à trouver le capitaine Farhio, le chef de la garde, pour lui raconter son histoire.
Comme chaque soir au moment où le village commençait à s’enfoncer dans la nuit, Diane savait qu’elle trouverait Farhio sur la place centrale, devant la taverne « l’oie grillée ».


Elle courut dans l’allée principale du village. Le rue s’illuminait de reflets bleus et rouges à mesure que la lumière de la lune venait petit à petit remplacer celle du soleil, et on voyait trembler à travers les fenêtres ouvertes les hautes flammes jaunes des feux de cheminée.

Diane aperçut au loin la place centrale, et après quelques foulées de plus, distingua nettement le capitaine Farhio au milieu d’autres hommes assemblés devant l’auberge. Il portait l’armure de cuir des soldats de Ballack, orné d’une hirondelle, le blason du comté. Il avait coincé son heaume sous son bras droit et tenait des gants de cuir dans sa main gauche.

Le capitaine avait l’habitude de venir parler aux habitants du village, le soir à cet endroit. Il venait « respirer l’humeur » des badauds, chercher dans les ragots toute information utile pour la sécurité.


- Qui est cette gamine là-bas ? demanda-t-il à l’assemblée qui suivit alors son regard vers le bout de la rue principale.

Diane arriva enfin, essoufflée, sur la place centrale.
- Capitaine ! Capitaine ! Hurla-t-elle avant de s’arrêter devant les villageois, courbée par la fatigue.

Le capitaine Farhio s’approcha d’elle
- Tiens, mais, par les esprits du bien, ne serait-ce pas la petite Diane ? Dis donc mon enfant, on m’a dit que tu l’avais échappé belle aujourd’hui …

- Capitaine, écoutez moi, j’ai découvert une chose incroyable au sud du village, au milieu de la lande … Il faut que vous alliez voir.

Intrigué, le reste de l’assemblée s’approcha à son tour, formant un arc de cercle autour de Diane. Parmi les badauds, elle reconnut le boucher Almar, son ennemi juré, les mains posées sur son ventre rond et taché de sang animal.

- Qu’est-ce que tu racontes ? Coupa le capitaine, le regard brillant.
- J’ai trouvé un corps enfoui dans le sable de la lande, capitaine. Un vieil homme, il était enterré dans le sable et sa main dépassait du sol.

Almar, le boucher, éclata de rire en se tapant sur le ventre.
- Elle est bien bonne celle-là ! Cette petite voleuse serait prête à raconter n’importe quoi pour se rendre intéressante ! Railla-t-il, entraînant le rire des autres villageois.

- Mais non ! Je vous jure que c’est vrai ! Tenez, s’écria Diane en sortant l’anneau de sa poche, il portait même cette bague au doigt !

- Ah ! C’est bien ce que je pensais ! Reprit Almar avant même que le capitaine ne pût intervenir. Tu as volé quelqu’un et tu inventes toute une histoire pour t’innocenter ! C’est bien cela ? Si ça se trouve, c’est même toi qui l’a tué ce vieil homme !

- Tais-toi !! Hurla Diane en entrant dans une rage folle.

Son injonction fendit l’air comme un éclair, si puissante qu’elle lui fit peur à elle-même. Au même instant, Almar fut projeté au sol ; comme s’il avait pris un violent coup de pied.
Le boucher tomba sur les fesses et les villageois restèrent bouche bée, puis ils éclatèrent de rire en voyant sa mine déconfite.

Mais Diane, elle, ne riait pas du tout. Elle avait senti son corps traversé par un spasme violent, le même choc qui l’avait saisie quand le poing du cadavre s’était refermé sur sa main au milieu de la lande.
Que lui arrivait-il ?
Complètement désorientée, elle commença à balbutier quelques mots sans aucun sens.

Mais le capitaine la sortit de sa torpeur. Il avait eu plusieurs fois affaire à la petite et savait qu’elle n’avait pas mauvais fond.

- Bon, écoute Diane, j’irai voir tout cela dès demain matin. Mais tu as mauvaise mine … très mauvaise mine. As-tu de quoi te payer une nuit d’auberge ?
- Oui mentit Diane.
- Je te promets que je ferai tout cela à condition que tu ailles te coucher dans une auberge et que tu me jures de te tenir tranquille, pour une fois. C’est bien compris ?

Diane acquiesça. Mais elle se demandait comment elle allait pouvoir payer l’auberge si Farhio la suivait pour s’assurer qu’elle dormait à l’abri. Elle n’avait plus un sou en poche. Si elle avait eu le moindre argent, jamais elle n’aurait tenté de retirer la bague d’un cadavre.

- Quant à toi Almar, ajouta le capitaine, tu ferais mieux de boire un peu moins le soir, tu ne tiens même plus sur te pattes, gros lard.

Les badauds se dispersèrent en riant, et Almar, sidéré, partit sans mot dire, se retournant de temps en temps pour lancer vers Diane de petits regards plein d’inquiétude.

En un instant la place fut vide. Diane tenta de se ressaisir, et voyant que le capitaine la surveillait du coin de l’œil, se dirigea vers l'auberge de "l’oie grillée".
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MessageSujet: Re: Le destin de Diane   Le destin de Diane Icon_minitimeSam 1 Nov - 17:57

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Pendant huit longues semaines, Imala resta sur le liteau pour allaiter ses louveteaux. Elle dut pourtant les abandonner plusieurs fois pour aller chercher elle-même une viande que la meute ne daignait pas partager.
La croissance de ses petits s’en ressentit. Alors qu’ils avaient le même âge que les petits d’Ahéna, ils semblaient plus maigres et plus fragiles.
Imala était affamée et épuisée. L’allaitement était devenu douloureux, et elle avait perdu beaucoup de poids. Ses os saillaient sous sa peau dégarnie.

Le sevrage fut difficile. Les louveteaux étaient décharnés et encore très malhabiles quand Imala les laissa pour la première fois seuls plus d’une nuit.
Elle revint le lendemain matin avec un chevreuil qu’elle défendit contre le reste de la meute et amena près de son liteau. Elle commença à manger sa proie et donna à ses petits la viande qu’elle régurgitait.
C’est sans doute ce qui les sauva ce jour là, alors que la famine les avait affaiblis pendant plus d’une semaine.

Un matin, comme il ne restait plus rien à manger sur la carcasse du chevreuil, Imala partit à nouveau chercher de la viande, seule, dans le cœur de la forêt.

Les cinq petits louveteaux, qui n’en pouvaient plus de rester sur la couche de leur mère alors que la nature les appelait partout autour d’eux, en profitèrent pour s’aventurer aux alentours de la tanière.
Là, ils rencontrèrent les petits d’Ahéna, dissipés et pleins de vie, qui jouaient dans les herbes et se couraient après, s’amusaient à se mordre, à lutter, et sautaient en tous sens, les uns par-dessus les autres.

En voyant arriver la portée d’Imala, les petits d’Ahéna se réjouirent : ils espéraient trouver là de nouveaux compagnons de jeu. Ils commencèrent à tourner autour, puis ils les taquinèrent du bout du museau avant enfin de jouer à la lutte avec ces adversaires trop aciles.
Les petits d’Imala, affaiblis par la malnutrition, parvenaient à peine à se défendre et sortirent épuisés de ces jeux trop violents pour eux.

Quand les petits d’Ahéna se lassèrent, ils repartirent vers le liteau de leur mère, et les cinq louveteaux d’Imala les suivirent en titubant.
Les deux portées se couchèrent ensemble et ne furent réveillées que quelques heures plus tard par les grognements de la louve dominante, visiblement surprise de voir les petits d’Imala mélangés aux siens.
Ahéna entra dans une colère folle et bondit sur les intrus.

Le premier louveteau fut mordu à la gorge jusqu’à ce qu’un violent coup de mâchoire lui brise la nuque sous sa chair déchirée. Il mourut sans gémir, n’ayant même plus la force de se plaindre.
La vue du sang excita encore d’avantage la dominante qui se jeta sur les quatre autres louveteaux en grognant. Un à un elle les sortit de la tanière.

Mordus à la gorge, secoués et jetés en l’air, les quatre louveteaux chétifs s’effondrèrent dans un bain de sang les uns après les autres, sous les crocs aiguisés de la louve.
Quand elle fut sûre qu’aucun ne bougeait plus, elle fit volte-face et retourna dans son liteau où l’attendaient ses propres petits, tremblant de peur.
Elle se coucha en poussant un long soupir.

À la tombée du soir, quand Imala revint bredouille à la tanière, elle découvrit quatre de ses petits, morts des suites de leurs blessures, et le cinquième, respirant à peine, allongé sur le flanc.
Paniquée, elle commença par faire rouler du bout du museau les cadavres de ses louveteaux, comme pour leur redonner de la vie.

Elle dut vite se rendre à l’évidence et attrapa délicatement le seul survivant pour le ramener au liteau où elle le lécha longuement, abandonnant les quatre morts à la lisière de la tanière.
Le dernier louveteau poussait de petits cris de douleur, entrecoupés par une respiration irrégulière. Ses poils gris étaient collés par son propre sang sous sa gorge et le long de ses côtes.

Quand les autres loups arrivèrent à la tanière et qu’ils commencèrent à sentir les cadavres des quatre louveteaux, Imala se dressa sur ses pattes en grognant, les babines retroussées, l’échine arquée et le poil hérissé.
Elle était terrifiante et les loups s’écartèrent la queue basse, sans plus oser toucher les dépouilles ensanglantées qui gisaient à l’entrée de la tanière.
Imala se coucha en rond autour de son dernier petit et poussa un long soupir en posant délicatement sa tête près di petit corps meurtri.

Le lendemain matin, les quatre corps avaient disparu. Imala ne chercha pas à savoir comment et se consacra plutôt au louveteau qui geignait contre son flanc.
Elle n’avait plus de lait pour le nourrir et plus de viande autour d’elle. Il lui fallait partir à nouveau, mais elle ne voulait pas abandonner son petit, craignant de le retrouver mort à son retour.

Elle décida donc de l’emmener avec elle. Elle prit le louveteau dans sa gueule, aussi délicatement qu’elle put, et s’éloigna lentement de la tanière, laissant la meute derrière elle avec indifférence.
Elle passa sans ralentir à côté des petits d’Ahéna qui jouaient à se battre à l’entrée de la tanière, et s’enfonça dans les bois le queue basse.

Elle marcha longuement au milieu de la forêt, dans la chaleur de l’été. Les couleurs et les chants joyeux des oiseaux ne changeaient rien à son humeur : Imala était épuisée, inquiète et déchirée.

Le louveteau était déjà mort depuis longtemps quand elle sentit qu’il ne bougeait plus dans sa gueule et que son petit corps s’était refroidi. Elle continua pourtant à marcher encore longtemps avec le cadavre de son dernier bébé coincé entre ses crocs et ne s’arrêta qu’à la nuit tombante pour déposer le corps immobile sous la racine d’un chêne énorme.

Assise sur son derrière elle hurla longuement, cherchant en vain les réponses réconfortantes de son espèce. Puis elle partit dans la nuit d’un trot rapide et régulier qui allait la porter loin de ces souvenirs déchirants.

C’est ainsi qu’Imala devint louve solitaire.


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